C'était un 24 décembre, comme aujourd'hui, mais tôt dans l'après-midi. Dans une grande maison blanche, on terminait les nettoyages de Noël. Il fallait que la demeure reluise des cuisines jusqu'aux chambres de bonnes pour accueillir dignement Celui qui devait naître dans quelques heures, l'Enfant Divin. La maîtresse de maison, une femme aimante, un peu débordée par ses huit enfants, s'était enfin assise dans son fauteuil et regardait le soleil rougissant disparaître entre les sapins. Toute la maison et ses habitants respiraient le bonheur du devoir accompli. Toute la maison? Pas vraiment. Dans le galetas où elles s'étaient réfugiées, chassées par les balais, les pattes à poussière et l'énergie nettoyeuse des femmes, les araignées se désolaient.
- Quelle horrible journée! Qu'avons-nous donc fait pour être pourchassées de la sorte, disait l'une.
- Traquées, anéanties, mais pourquoi donc? se plaignait une seconde.
- Il y a un mystère là-dessous. Je propose que ce soir, quand tout dormira, nous explorions la maison jusqu'au salon, pour essayer de le découvrir.
Sa proposition a été acceptée. Le temps, lentement, lentement, s'est égoutté jusqu'au moment où enfin, on n'a plus entendu dans la maison que les bruits du sommeil. Alors, en file indienne, les araignées sont descendues jusqu'au salon. La porte était entr'ouverte. Le réverbère à gaz de l'avenue projetait sa douce lumière jusque dans la pièce.
Ah quelle merveille ! Quelle beauté ! Les noires petites bêtes en sont restées figées !
Dans un angle, s'élevant vers les stucs du plafond, un sapin du vert le plus profond : il était décoré de mille splendeurs. Des boules multicolores aux ors mats, des angelots d'argent, des pommes brillantes, des noix, des biscuits d'anis, des biberlis pendaient à ses branches, attachés par des fils d'or. La première, la hardie est sortie de sa contemplation et s'est dirigée vers l'arbre. Puis elle a regardé ses soeurs.
Oseront-elles? Elles ont osé.
Avec douceur, pleines d'émerveillement, elles ont parcouru l'arbre dans tous les sens, s'arrêtant qui sur une boule bleu acier, qui sur un ânon de papier ou une aiguille odorante.
Elles arrivaient au terme de leur chemin. Le roi de la forêt était maintenant recouvert du haut en bas d'un entrelac d'affreuses toiles grises. A ce moment là, on a entendu comme un grand vent dans la cheminée et le Père Noël est apparu, les bras chargés de paquets. Il a vu les araignées et les a saluées d'un sourire plein de tendresse puis il a installé les cadeaux sous l'arbre. C'est en se relevant qu'il s'est rendu compte du désastre. Il a imaginé la maman et ses enfants, au matin de Noël, devant l'arbre, des larmes de déception inondant leurs visages. Non, il ne laisserait pas faire ça. Il a tendu ses mains ridées et il a béni le travail des insectes velus. Un léger grésillement s'est fait entendre. Sous leurs yeux stupéfaits, les araignées ont vu l'arbre se métamorphoser, leur fils si ternes et gris se mettant à briller comme des étoiles.
Elles sont remontées dans leur galetas, toujours en file indienne, les yeux plein de la lumière de Noël. On dit que depuis ce jour-là, de scintillantes guirlandes d'or et d'argent garnissent, elles aussi, notre arbre de Noël.
Je ne sais plus si cette légende est d'origine allemande, suisse ou d'un pays de l'est, toujours est-il que la photo suivante représente un sapin en Ukraine...
Et pour rendre un petit hommage à notre sapin, laissons lui la parole :
"Un sapin réfléchissait :
J'ai perdu la neige, c'est vrai,
Les nuages et le vent frais
Et les oiseaux qui chantaient.
En échange, on m'a offert
De fragiles boules en verre,
Des bougies et des lumières,
Et des guirlandes légères.
Les enfants en pyjama
Chantent et dansent
Autour de moi.
C'est un beau destin
Pour un sapin !"
Je l'ai "piqué" sur un blog sympa : http://avenuedestissusblog.wordpress.com/2012/11/29/comptine-noel-sapin/
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